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Logement insalubre : quels droits pour le locataire ?

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En bref
Les locataires disposent d’un pouvoir d’initiative dans le déclenchement d’une procédure d’insalubrité (en cas de carence des pouvoirs publics) et de droits dans le déroulement de cette procédure (notification des différents actes de la procédure, droit de participer aux réunions…).
En cas d’arrêté d’insalubrité, les propriétaires sont redevables d’obligations à l’égard des occupants, notamment une obligation d’hébergement ou de relogement (selon que l’insalubrité est remédiable ou irrémédiable). Les loyers cessent d’être dus à compter de l’arrêté d’insalubrité et, en cas de résiliation du bail par le locataire, le propriétaire devra quand même répondre à ses obligations de relogement et d’indemnisation.

La police des immeubles insalubres est une police spéciale confiée au préfet. Elle a été réformée par la loi SRU du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, qui a apporté des modifications importantes aux dispositions en vigueur, notamment en simplifiant la procédure et en renforçant les droits des occupants, mettant à la charge des propriétaires une obligation d’hébergement temporaire ou de relogement.
Mais concrètement, quels sont les droits des locataires de logements insalubres, face à des propriétaires récalcitrants ?

Procédure d’insalubrité
La procédure d’insalubrité peut être mise en œuvre lorsqu’un immeuble, bâti ou non bâti, vacant ou non, attenant ou non à la voie publique, constitue soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé ou exploité, un danger pour la santé des occupants ou des voisins (L. 1331-26 CSP).
La procédure d’insalubrité est confiée au préfet. Elle est régie par les articles L. 1331-26 et suivants du Code de la Santé Publique (CSP).
La procédure est engagée par un rapport motivé du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales (DDASS) ou, dans certaines communes, du directeur du service communal d’hygiène et de santé. Ces autorités peuvent agir soit de leur propre initiative, soit à la demande du maire, soit encore à la demande de tout locataire ou occupant des immeubles concernés (L. 1331-26 CSP).
Recevant le rapport du DDASS, le préfet saisit le conseil départemental d’hygiène et de santé qui doit se prononcer dans les deux mois sur la réalité et les causes de l’insalubrité, ainsi que sur les mesures propres à y remédier. Les personnes intéressées (dont les locataires en tant qu’occupants de l’immeuble) doivent être avisées par le préfet, au moins 30 jours à l’avance, de la tenue de la réunion du conseil départemental. Elles peuvent consulter le rapport de la DDASS à la préfecture ou à la mairie, produire des observations écrites ou demander à être entendues par le conseil départemental et à assister aux visites des lieux.
L’avis rendu par le conseil départemental d’hygiène et de santé lie le préfet (CE, 1976, Ministre de la santé c/ Bidegain). Celui-ci ne peut prendre un arrêté d’insalubrité que si le conseil a conclu à l’existence d’une situation d’insalubrité. Les mesures prescrites par l’arrêté doivent être celles qui sont préconisées dans l’avis du conseil.
Aucune disposition n’impose que l’avis du conseil départemental soit notifié aux personnes intéressées.
L’avis doit se prononcer expressément tant sur la réalité de l’insalubrité que su le caractère irrémédiable ou non de celle-ci, et indiquer éventuellement les mesures propres à y remédier.

Arrêté d’insalubrité
Si le conseil départemental d’hygiène et de santé estime que l’immeuble est insalubre, le préfet doit, dans un délai d’un mois suivant l’avis, prendre un arrêté d’insalubrité.
Cet arrêté doit reproduire les dispositions des articles L. 521-1 à -3 du Code de la Construction et de l’Habitation (CCH), relatives au relogement des occupants.
L’arrêté doit être notifié aux personnes intéressées (dont le locataire en tant qu’occupant).
L’arrêté d’insalubrité peut, dans certains cas, porter interdiction d’habiter et d’utiliser les lieux. Pendant la durée de cette interdiction, le propriétaire est tenu d’assurer le relogement ou l’hébergement des habitants, dans les conditions prévues aux articles L. 521-1 à -3 CCH. Il en va de même pendant la période au cours de laquelle un logement est rendu inhabitable du fait de l’exécution de travaux prescrits par l’arrêté d’insalubrité.
Il existe deux types d’insalubrité :
• L’insalubrité remédiable : le conseil départemental d’hygiène et de santé doit alors indiquer, dans son avis, les mesures appropriées pour remédier à l’insalubrité et les délais d’exécution. L’arrêté d’insalubrité prescrit la réalisation de ces mesures dans ces délais (L. 1331-28 al.5 CSP). Le préfet peut également prononcer l’interdiction temporaire d’habiter ou d’utiliser les lieux, interdiction qui demeurera applicable jusqu’à la mainlevée de l’arrêté d’insalubrité. Les mesures prescrites ne doivent pas entraîner pour le propriétaire une charge excessive hors de proportion avec la valeur de l’immeuble ou avec les revenus qu’il peut procurer.
• L’insalubrité irrémédiable : dans le cas où l’avis du conseil départemental conclut à l’impossibilité de remédier à l’insalubrité, l’arrêté du préfet porte interdiction définitive d’habiter ou d’utiliser les lieux (L. 1331-28 al. 1 à 4 CSP). La date d’effet de l’interdiction peut, sur l’avis du conseil, être différée.

Contestation de l’arrêté d’insalubrité
Les propriétaires et les locataires des immeubles frappés par un arrêté d’insalubrité peuvent saisir le tribunal administratif (recours de plein contentieux), dans les deux mois de la notification de l’arrêté préfectoral.

Lorsque les mesures prescrites n’ont pas été exécutées dans le délai imparti, le maire ou le préfet adresse une mise en demeure au propriétaire. Si cette mise en demeure n’est pas suivie d’effet dans les deux mois qui suivent, il peut ordonner l’exécution d’office des mesures (L. 1331-29 CSP).
Le coût des travaux exécutés d’office, de même que les frais d’expulsion, de relogement et d’hébergement des occupants, sont à la charge du propriétaire.

Mainlevée de l’arrêté d’insalubrité
Une fois les travaux réalisés, le préfet vérifie leur conformité aux prescriptions de l’arrêté d’insalubrité. Le cas échéant, il prend un arrêté par lequel il constate cette conformité ainsi que la date d’achèvement des travaux, et prononce la mainlevée de l’arrêté d’insalubrité et de l’interdiction d’utiliser les lieux dont il était éventuellement assorti (L. 1331-28-3 CSP).

Relogement des habitants des bâtiments insalubres et effets de la procédure sur les loyers
La loi SRU a introduit dans le Code de la Construction et de l’Habitation d’importants dispositions relatives au relogement des occupants des immeubles faisant l’objet d’interdiction d’habiter dans le cadre d’une procédure d’insalubrité puisque le propriétaire doit assurer le relogement ou l’hébergement des occupants et contribuer au coût correspondant (L. 521-1 à -4 CCH).
L’obligation de relogement ou d’hébergement s’applique lorsque l’immeuble fait l’objet d’un arrêté d’insalubrité assorti d’une interdiction d’habiter temporaire ou définitive ou lorsque les travaux nécessaires pour remédier à l’insalubrité ou au péril rendent temporairement inhabitables un logement.
En cas d’interdiction temporaire d’habiter, le propriétaire est tenu d’une obligation d’hébergement (L. 521-3 I CCH). L’hébergement doit être décent et correspondre au besoin des occupants. En cas d’inaction du propriétaire, le préfet prend les mesures nécessaires pour assurer l’hébergement provisoire, aux frais du propriétaire.
En cas d’interdiction définitive d’habiter, le propriétaire doit assurer le relogement des occupants (L. 521-3 II CCH). Cette obligation est satisfaire par la présentation à l’occupant de l’offre d’un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités financières. En cas de défaillance du propriétaire, la collectivité publique prend les dispositions nécessaires en vue du relogement.
Le propriétaire est tenu de verser à l’occupant évincé une indemnité destinée à couvrir ses frais de réinstallation. Le montant de cette indemnité est égal à trois mois du nouveau loyer.
Les obligations de relogement sont applicables en cas de résiliation du bail par le locataire en application des dispositions de l’article 1724 al3 du Code civilSi les réparations sont de telle nature qu’elles rendent inhabitable ce qui est nécessaire au logement du preneur et de sa famille, celui-ci pourra faire résilier le bail »).

L’article L. 521-2 CCH précise l’incidence de la procédure d’insalubrité sur les loyers et les baux d’habitation afférents aux locaux qui en font l’objet.
Les loyers cessent d’être dus à compter du premier jour du mois suivant l’envoi de la notification de l’arrêté d’insalubrité.
La durée du bail est prolongée de la durée de l’interdiction temporaire d’habiter. Celui-ci ne cesse pas de plein droit et le locataire devra donc demander la résiliation du bail s’il souhaite partir. Cette résiliation répond aux conditions de l’article 1724 alinéa 3.

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