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Nouvelle sanction de la violation du pacte de préférence : désormais la substitution du bénéficiaire dans les droits de l’acquéreur de mauvaise foi est admise (Ch. Mixte, 26 mai 2006)

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Un arrêt de la chambre mixte en date du 26 mai 2006 vient de remettre en cause le traditionnel refus de la haute juridiction de substituer le bénéficiaire d’un pacte de préférence au tiers acquéreur du bien réservé, en cas de violation de ce pacte.

En l’espèce, un bien immobilier avait été attribué aux termes d’un acte authentique de donation-partage contenant un pacte de préférence. Par acte de donation-partage ultérieur rappelant ce pacte de préférence publié, une parcelle dépendant de ce bien a été transmise à un donataire qui l’a ensuite revendue à une SCI.
Le bénéficiaire du pacte de préférence stipulée dans l’acte initial a alors invoqué la violation du pacte et demandé à être substitué dans les droits de l’acquéreur. Faute de preuve de la collusion frauduleuse entre le vendeur et l’acquéreur au détriment du bénéficiaire évincé, la cour d’appel n’a pas accueilli favorablement cette demande.
La Cour de cassation a également rejeté le pourvoi formé par le bénéficiaire du pacte, mais elle indique que le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’obtenir sa substitution à l’acquéreur « à condition que le tiers acquéreur ait eu connaissance lorsqu’il a contracté, de l’existence du pacte de préférence et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir ». En l’espèce, pareille fraude n’était pas démontrée et la Cour de cassation ne pouvait donc ordonner la vente au profit de la bénéficiaire du pacte.

C’est la première fois que la Cour de cassation indique qu’au-delà des sanctions traditionnellement reconnues du pacte de préférence que sont l’annulation de la vente et la condamnation à des dommages et intérêts, la violation du pacte peut désormais être sanctionnée par la substitution du bénéficiaire évincé dans les droits du tiers acquéreur qui connaissait l’existence du pacte de préférence et l’intention de son bénéficiaire de s’en prévaloir.
Cette solution avait toujours été refusée par la jurisprudence de la Cour de cassation.
Jusqu’alors la jurisprudence n’acceptait d’engager la responsabilité délictuelle du tiers acquéreur que dans des conditions très strictes, fondées sur le concept de fraude (la Cour de cassation exige en effet que le tiers acquéreur ait eu connaissance du pace et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir).
Si les conditions cumulatives sont remplies, la nullité de la vente passée avec le tiers acquéreur était traditionnellement prononcée. A défaut de cette double connaissance, la jurisprudence a admis que, si le tiers acquéreur connaissait au moins l’existence du pacte, alors il pourrait engager sa responsabilité délictuelle mais seulement par l’allocation de dommages et intérêts.
La grande question qui s’est posée a été de savoir si le bénéficiaire du pacte pouvait être admis à se substituer au tiers acquéreur ? 3ème civ, 30 avril 1997 a répondu par la négative, considérant que le bénéficiaire n’est titulaire que d’une simple créance de faire qui se résout en dommages-intérêts en vertu de l’article 1142 du Code civil.

Le revirement de la chambre mixte suscite des interrogations quant à la solution identique en matière de rétractation d’une promesse unilatérale de vente (3ème civ, 15 décembre 1993 puis 26 juin 1996). Mais autant la solution en matière de rétractation d’une promesse unilatérale est contestable car le consentement à la vente du promettant avait déjà été donné définitivement, autant la solution de la chambre mixte est ici difficile à justifier car dans un pacte de préférence, les volontés de vendre et d’acheter ne se sont jamais rencontrées. Il est donc excessif d’imposer la vente entre des parties dont la volonté ne s’est jamais rencontrée.
Mais il y a bien eu un engagement du promettant qui est celui-ci : si je vends, je vous proposerai le bien par préférence. Or il a vendu, mais n’a pas proposé. La violation de son engagement doit justifier la volonté du bénéficiaire d’acheter en dépit de la vente au tiers.

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